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LE SPECTRE DE LA RUE SAINT-JACQUES :
JEAN CONTRUCCI
JCLattès Oct. 2006, 466 pages, 15,50 €

4° de couverture :

Marseille, avril 1906. Dans le parc de la propriété « la Mitidja » est retrouvé un cadavre... vieux de dix ans ! Quelques jours plus tard, un employé des lieux meurt brutalement après avoir reçu des lettres de menaces. Honoré Castellain, propriétaire et premier suspect, est soupçonné mais aussitôt relâché.
En chasse d’informations pour la rubrique judiciaire du Petit Provençal, Raoul Signoret se passionne pour l’affaire, aidé de son fidèle oncle Eugène Baruteau, chef de la police. Il retrouve avec émotion son premier camarade d’école, Edouard Castellain, qui lui confie des informations de première main sur les sinistres évènements survenus au domaine paternel. Mis à pied pour son refus de chanter les louanges de la politique coloniale, Raoul devient libre pour l’enquête... Celle-ci l’entraînera, avec sa femme la pétillante Cécile, d’Alger la blanche aux séances de spiritisme : un cerbère meurtrier et un fantôme inquiétant sont au rendez vous.

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Après l’Enigme de la Blancarde, La faute de l’abbé Richaud, le Secret du Docteur Danglars et Double crime dans la rue Bleue, Jean Contrucci, critique littéraire à La Provence, nous conte un nouveau mystère de Marseille, élucidé par le désormais mythique tandem Signoret-Baruteau

La pub de Lattès (voir marque-page ci-contre) dit :
Du mystère, de l’humour et de la castagne !
Et elle a parfaitement raison, la pub des éditions Lattès. Il y a tout cela et beaucoup plus, dans le dernier roman de Jean Contrucci, cinquième tome des Nouveaux Mystères de Marseille, où il continue, toujours avec le même brio, à nous régaler avec des histoires merveilleusement contées.

Il nous régale avec des intrigues embrouillées à souhait. A l’époque, il n’y avait pas des Experts qui, avec un brin d’ADN, peuvent dire à qui appartient un cadavre. Alors, à l’époque, on ne pouvait faire que des suppositions et Raoul et Baruteau se perdent en conjectures. Qui est ce cadavre découvert dans la propriété du riche Castellain ? Sa soeur, qu’il aurait fait disparaître pour garder tout l’héritage ?  Ou quelqu’un d’autre ? Mais qui ? Et qui a écrit la lettre anonyme qui a mis la police sur la piste de ce squelette ? Et qui a fait sauter le carrier qui a travaillé au domaine ? Les deux affaires sont-elles liées ? Sans oublier les séances de spiristisme où apparaissent de bien étranges fantômes. 

Il nous régale grâce l’humour qui baigne tout le roman qu’on lit avec, bien souvent, un sourire aux lèvres. Il faut lire le dialogue du chapitre 10, où Raoul propose à Cécile de partir en voyage à Alger ! Quel délice ! Et les joutes verbales entre Raoul et Baruteau ! Je ne vous dit que ça ! Et les clins d’oeil : un des personnages se nomme Danbrone ! Cela ne vous dit rien ?

Il nous régale aussi avec les petits plats que mitonne Thérèse Baruteau : Ah ! la recette des alouettes sans tête ! Il nous vient l’eau à la bouche ! Sans oublier celle de la soupe au pistou !

Il nous régale par l’évocation de cette époque qui trouve un écho à des préoccupations contemporaines, comme ici, la conquête coloniale ou bien par des détails historiques qu’il glisse avec adresse au cours du récit et l’enrichit sans en détruire le rythme.

Comme vous l’avez compris, ce livre, comme ceux qui le précédent, est un vrai régal de lecture et déjà on a envie de dire : A quand le prochain ?

Alors : A quand le prochain ?

L'année prochaine, même jour, même heure. Mais digérez d'abord celui-là,  c'est le plus gros de la série : il fait 466 pages !

Et quel est son titre, si ce n’est pas indiscret ?

Le titre du tome 6 sera - si mon éditeur ne me demande pas de le modifier d'ici la parution : "Les diaboliques de Maldormé" du nom de cette calanque entaillée dans la côte rocheuse qui va du Vieux-Port de Marseille aux plages du Prado et que nous persistons à désigner comme "La Corniche" bien qu'elle porte le nom d'un président Etasunien révolverisé à "Dal-las-ton-univers-impitoyââââbleu" (Texas).

On sent que vous ne vous contentez par d’écrire un simple roman policier, mais que vous en profitez pour évoquer des problèmes contemporains : la condition ouvrière des cigarières dans Le double crime de la rue Bleue, ou ici, à travers l’exposition coloniale de 1906 à Marseille, les problèmes de la conquête coloniale.

Ce qui est bien avec le genre, c'est qu'on n'est pas obligé de s'en tenir strictement à l'intrigue policière. C'est l'occasion  d'aborder les problèmes de société, de rappeler des faits oubliés ou escamotés  par l'Histoire officielle, d'autant plus  qu'elle se répète  quand elle ne bégaie pas. C'est un moyen de réveiller les mémoires oublieuses. Je sais  qu'il y a des lecteurs (trices)  qui préfèrent qu'on  ne déborde pas sur les problèmes de société ou les évocations historiques quand on prétend écrire un polar, mais je reste persuadé  qu'ils nourrissent la trame policière, l'enrichissent, donnent épaisseur aux personnages et lui fournissent des racines. En tous cas, c'est ma "manière"

La pub de Lattès dit : du mystère, de l’humour et de la castagne : est ce que c’est la recette idéale pour écrire un livre à succès  (sans oublier les recettes de cuisine de Thérèse Baruteau) ?

Si on connaissait la recette idéale, on mettrait dans le mille à chaque coup. Disons qu'il s'agit d'ingrédients. La liste n'est pas limitative.

Je suppose que ce livre a demandé de nombreuses recherches, sur l’exposition coloniale, sur le spiritisme, sur la région de la Mitidja ?

Exact. 1906, l'année où se déroule l'intrigue est celle de la première exposition coloniale française. L'occasion était trop belle de montrer la bonne conscience de la société de la Belle Epoque face à l'exploitation des peuples colonisés et le pillage de leurs ressources. L'actualité récente, les polémiques nées après l'idée saugrenue du parlement français actuel de souligner "l'aspect positif" de la colonisation en gommant soigneusement ses aspects négatifs, donnent  au roman  sa justification. Quant au spiritisme, c'était la distraction favorite des bourgeois de la Belle Epoque. La télé avant la lettre; si vous préférez (On faisait apparaître des "images" venues d'ailleurs dans les salons!) Avec la même capacité d'attraper les gogos et d'abrutir les esprits.

Le lecteur se demande toujours comment naît un roman. Quel a été le point de départ de celui-ci ?  

Au fond, je viens de répondre: l'exposition coloniale de 1906 et la vogue des "tables parlantes" et des esprits frappeurs.

Comme le tome 6 est déjà écrit je suppose que vous commencez déjà à penser au tome 7 ? Ou bien avez-vous envie de passer à autre chose, revenir au roman "traditionnel" ou encore entamer une autre série pour changer ?

Pour l'instant, je pense surtout au nouveau-né et lui donne tous mes soins pour qu'il grandisse. Mais il est vrai que je songe à un tome 7. Il est encore dans les limbes. jusqu'à plus ample informé, je ne pense pas à changer de genre. J'ai déjà "donné" et les lecteurs attentifs pourront se tourner vers mes romans "d'avant les Nouveaux Mystères de Marseille" s'ils ont envie de voir ce que ça donne quand je ne sévis pas dans le polar.

Avez-vous une idée du nombre de volumes qui constitueront les Nouveaux Mystères de Marseille ?

Pas la moindre.

Merci !

Octobre 2006

Visitez le site de Jean Contrucci : http://jeancontrucci.free.fr

 

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