Pierre Chaine (1882-1963), dramaturge connu et associé plusieurs fois à Noré Brunel dans ses écrits policiers, nous livre là un texte raconté en solo qui démontre tout son talent et son ingéniosité à inventer des énigmes dénouées avec virtuosité et simplicité.
L’inspecteur Forval, du parquet de Seine-et-Oise, a cherché dans la police une occupation provisoire… qui dure depuis 20 ans, sa première vocation ayant été le professorat. Chargé des missions secondaires parce que ses chefs lui reprochent une trop grande fantaisie – il s’abandonne trop à ses intuitions ! – le voilà tourmenté par les « anomalies » qu’il a constatées dans une affaire que lui a confiée son chef direct après qu’il s’y fût trouvé mêlé involontairement au cours d’une « planque » qui n’avait rien donné.
Un propriétaire de Laboratoires Pharmaceutiques nommé Bouvard a été retrouvé mort, empoisonné dans sa villa de St-Cloud, avec, sur sa table-bureau, deux verres dont l’un a contenu du cyanure. Or c’est ce poison radical qui l’a tué.
Il a laissé une lettre inachevée à sa maîtresse, la veuve d’un diplomate qu’il dit vouloir épouser dans les meilleurs délais et pourtant, par testament, il lègue toute sa fortune à un ami médecin pour sa recherche contre le cancer… Et son neveu, héritier naturel, est fiancé à la fille du docteur tandis que l’industriel s’opposait au mariage sous prétexte que la situation du neveu ne lui permettait pas de fonder un foyer…
Or, les empreintes sur le verre sont celles du docteur… Sans se poser de question, le juge a donc inculpé le docteur…
L’inspecteur Forval ne croit pas à cette culpabilité trop évidente. « Un travail intense se faisait dans son cerveau. Toutes les remarques, les petits faits qu’il avait enregistrés se heurtaient dans sa tête sans qu’il pût ordonner leur incohérence. »
C’est en tombant par hasard sur les 4 règles qui forment la base de la méthode que Descartes développe dans son « Discours », dont celle de ne rien omettre, qu’il va aboutir à un tout autre scénario que celui envisagé par le juge et cela va amener la libération du docteur sans forcément amener celle du coupable.
Michel GRANGER
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