KARINE GIEBEL
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Photo Stephane LOMBARDO

KG_photo remise prix marseillais du polar 2005

Remise du prix Marseillais du Polar 2005 à Karine Giebel

J’avais lu Terminus Elicius (prix Marseillais du Polar 2005) de Karine Giebel que j’avais trouvé excellent. Pour un premier roman c’était un coup de maître. Je viens de terminer Meurtres pour rédemption, et là, le choc ! Un roman qui prend aux tripes et ne vous quitte plus ! J’ai voulu en savoir plus sur son auteur. Une petite recherche sur internet nous apprend ceci :

Karine Giebel est née en 1971 à La Seyne Sur Mer (Var). Après des études de droit, une licence en poche, a fait pas mal de boulots différents dont surveillante d’externat, pigiste et photographe pour un petit journal local, saisonnière pour un Parc National ou encore esclave chez Mc Do… Elle a ensuite intégré l’administration. Elle travaille actuellement au sein d'une communauté d'agglomération.

Je lui ai envoyé mon petit questionnaire :

Mon Polar : Questions traditionnelles : pourquoi écrire ? Depuis quand écrivez-vous ?

Karine Giebel : Ecrire, parce que je ne peux pas faire autrement. J’en ai besoin.
Et ça a commencé il y a longtemps !

Pourquoi du polar ? Avez-vous écrit autre chose ? Si oui, quoi ?

Le polar s’est imposé à moi, car ce que j’écris est noir, très noir. En plus, j’aime créer le suspens, monter une intrigue. J’aime aussi la liberté qu’on trouve dans le polar.
Je n’ai rien écrit d’autre qui vaille la peine qu’on en parle !

Parlons un peu roman policier. Le "polar" c'est quoi pour vous ?

Le polar, bien souvent, est le reflet d’une société. Il est parfois engagé, jamais nombriliste. Il peut permettre de dénoncer ce qui nous révolte, notamment. Avec une liberté de ton particulière et en essayant, dans la mesure du possible, de ne pas ennuyer le lecteur !
Mais le polar, c’est tellement de choses… roman noir, policier ou thriller… C’est du roman, avant tout, qui n’a rien à envier à « la blanche ».

Quels sont vos auteurs de romans policiers préférés ?

Je lisais peu de romans policiers avant de me mettre à en écrire.

C’est curieux !

Oui, c'est curieux d'écrire des polars alors que je n'en lisais pas à l'époque. Mais au moins, on ne pourra pas dire que j'ai subi des  influences  !!

Combien de temps en moyenne pour écrire un roman ? Par exemple pour Meurtres pour rédemption qui est un sacré pavé ?

Pour Meurtres pour rédemption, j’ai mis 4 mois (temps d’écriture, sans compter la préparation, c'est-à-dire le temps passé à se documenter)
En moyenne, entre 1 et 6 mois.

Comment écrivez-vous vos romans ? En partant sur une vague idée et en découvrant les péripéties au fur et à mesure ou bien en suivant un schéma bien défini que vous suivez à la lettre ?

C’est variable !
Parfois, j’ai déjà un scénario à peu près construit en tête. Mais c’est plutôt rare !
Souvent, je me lance avec une simple idée : un personnage, un lieu, un thème. Et j’improvise au fur et à mesure des pages.
En tout cas, je ne fais jamais de « plan » précis : au début, j’ai essayé, mais je ne les respecte jamais !

Terminus Elicius a obtenu le prix Marseillais du polar. Un premier roman : un prix. Quel effet ? Cela présente-t-il un avantage pour la suite ?

Une très forte émotion ! Obtenir un prix, décerné par les lecteurs, pour un premier roman, c’est très émouvant, très encourageant.
Mais pour la suite, je n’ai pas l’impression que ça m’ait particulièrement aidée, quoique ça a dû un peu attirer l’attention sur mes écrits, tout de même… Mais en tout cas, ça reste un souvenir fort.

Dans Meurtres pour rédemption vous décrivez un univers carcéral d’une grande cruauté qui soulève de nombreuses questions. Avez-vous fait une enquête sur les prisons avant d’écrire ce roman ? Le lecteur se demande si tout ça n’est pas exagéré ? Des matons aussi sadiques existent-ils vraiment ?

Bien sûr, je me suis documentée sur les prisons françaises pendant des mois, avant de me plonger dans l’écriture de ce roman. Et cela n’a pas été facile car, bien entendu, c’est un milieu très fermé, sans mauvais jeu de mots !

J’ai lu nombre de documents traitant de la question, des rapports d’associations, des témoignages de détenus, mais aussi de gardiens de prison. J’ai ensuite réussi à m’entretenir avec 2 gardiens (ils ont accepté de me parler, à condition, bien entendu, que je ne trahisse jamais leur identité, étant donné leur devoir de réserve) Ils m’ont appris des choses qu’aucun livre ne révélera jamais…

Tout ce que j’évoque dans ce roman, si on met de côté « l’histoire », purement imaginaire, est basé sur des faits réels. Tout ce qui concerne les conditions de vie en prison s’inspire de la réalité. Et encore, il y a des choses que je n’ai pas évoquées, car encore plus choquantes que celles racontées dans le roman… Et puis, pour être exhaustive, il m’aurait fallu trois romans de cette taille là !

L’impression d’exagération que peuvent ressentir certains lecteurs, vient peut-être du fait que tout se concentre sur un petit nombre de personnages. Mon héroïne « cumule », si je puis dire, les accidents de parcours et les déboires pendant son incarcération. Parfois même, elle les provoque.

Quant aux matons, je crois avoir essayé d’être la plus nuancée possible : oui, il y en a certains, (heureusement une infime partie du personnel pénitentiaire !) qui choisissent ce boulot pour assouvir certains instincts sadiques, pas forcément conscients, et ils sont représentés dans « Meurtres pour rédemption ». On voit là le risque, toujours présent, d’assister à des dérapages lorsque quelqu’un possède un pouvoir sur d’autres personnes : il peut en abuser, la tentation est toujours là, depuis la nuit des temps.

Il y a d’autres « matons » qui deviennent brutaux, à force de côtoyer ce milieu très dur et d’être, eux aussi, « enfermés ». Entre gardiens de prison, l’ambiance est paraît-il aussi très « rude », sans pitié… Ce qui peut faciliter les tensions et les fameux dérapages.

Il y a ceux, l’immense majorité, qui font ce travail pour ne pas être au chômage.

Et puis, il y a ceux qui font leur possible pour donner un sens à leur boulot, qui essaient tant bien que mal avec les moyens offerts, d’assurer leur mission de réinsertion auprès des détenus, mission mise à mal le plus souvent par le manque de moyens dont souffre l’administration pénitentiaire.

J’ai donc essayé, dans ce livre, de peindre une galerie de personnages représentatifs de la réalité.

Il y a dans ce roman des scènes difficiles à supporter, je pense en particulier à celle sous la douche où l’héroïne est attaquée par les autres détenues. N’avez-vous pas eu peur d’aller trop loin dans l’horreur ?

Encore une fois, l’horreur existe en prison. Dans les prisons françaises.
Comment traiter un sujet pareil sans l’évoquer ? Pourquoi l’occulter ?
Je ne suis pas une adepte de la violence gratuite ou de la complaisance. Mais je ne pouvais pas traiter de ce sujet autrement qu’en plongeant dans l’horreur.
Ceci dit, je savais que certains lecteurs seraient choqués.
Mais ce qui se passe en prison est choquant. Alors, pourquoi édulcorer la réalité dans ce roman ?

Et dans quel état est l’auteur quand il décrit de telles scènes ?

Dans le même état que le lecteur !! Peut-être pire encore…

Et avez-vous eu des remarques, des reproches à propos de cette cruauté ?

Des remarques, oui. Des reproches, assez peu.
Encore une fois, cette violence ou cette cruauté font partie de ce livre de part le sujet qu’il aborde. Elles ne sont pas là par hasard ou pour donner un style. Elles sont le reflet d’une réalité et les lecteurs, dans leur ensemble, l’ont bien compris.

Je suppose qu’un auteur, comme le lecteur, s’attache au héros du livre, ici c’est une héroïne qui est dans une position bien difficile. Et le lecteur se demande comment cela va se terminer. Happy end ou pas ? Sans dévoiler cette fin, est-ce que vous saviez dès le début comment cela allait se terminer, ou bien avez-vous hésité : je fais une happy end ou pas ?

Oui, je m’attache à mes personnages. C’est toujours difficile de les quitter, d’ailleurs !
Non, je ne savais pas comment l’histoire allait se terminer. Disons que j’avais déjà un sentiment sur la fin, mais rien de précis…

Comment vous est venue l’idée de ce roman ?

Tout simplement avec l’envie d’écrire sur le thème de la prison. Sur celui de l’enfermement, de la culpabilité, aussi. Et de réfléchir sur la liberté. Car, finalement, la liberté, ce n’est pas simplement l’absence de barreaux.

Personnellement j’ai été « scotché » comme on dit par ce roman, son traitement, sa violence extrême. J’ai été étonné de ne pas avoir vu beaucoup de commentaires sur ce livre. Peut-être que ce pavé aux petits caractères a pu rebuter les lecteurs ? Avez-vous eu des échos à ce propos ?

Oh que oui !! Le problème de la police de caractère est un lourd handicap pour ce roman. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles plus jamais je ne travaillerai avec cet éditeur… Une raison parmi d’autres !

Ce roman aurait dû faire 1000 pages, ou deux tomes. Mais pour des raisons financières, l’éditeur a choisi de réduire le nombre de pages et donc, la police de caractère. Mauvais calcul qu’il doit aujourd’hui assumer pleinement.

J’entends souvent sur les salons les lecteurs faire ce reproche, m’en rebattre les oreilles ! Et je les comprends… Certains libraires ont même décidé de ne pas vendre ce livre à cause de sa présentation. Sans se demander d’ailleurs si ce qu’il y avait à l’intérieur méritait, ou non, d’être proposé aux lecteurs !

Mais ce livre a des « fans » motivés ! On en parle sur certains sites ou forums internet. Il a suscité parfois un réel engouement.

Toutefois, comme il n’a bénéficié d’aucune promotion, et d’une diffusion-distribution défaillante, il n’a pas eu sa chance…

Mais au moins, il existe.

L’avez-vous proposé à d’autres éditeurs ou bien uniquement à La Vie du Rail ? Je pense qu’il aurait mérité d’être publié par un plus grand éditeur. Peut-être sera-t-il réédité dans une autre collection plus connue ?

Non, ce roman était destiné dès le départ à la collection Rail Noir. Une très belle collection, d’ailleurs, éclectique et de qualité, dirigée par deux personnes sensationnelles : Jacky Pop et WoôManh (qui ne sont plus désormais directeurs de Rail Noir, je le précise) Ce sont eux qui m’ont demandé d’écrire ce second Rail noir, ce que j’ai accepté avec grand plaisir. Malheureusement, l’éditeur n’a pas été à la hauteur de leur talent et n’a jamais donné sa chance à cette collection. C’est du gâchis pur et simple !

Quant à Meurtres pour rédemption, il n’a pas dit son dernier mot… 

Mais il est encore trop tôt pour révéler quoi que ce soit à ce sujet !

Vous entrez au Fleuve Noir, c’est une sorte de consécration. Comment cela s’est-il passé ? Vous avez proposé votre nouveau roman à plusieurs éditeurs ?

Ce n’est pas moi qui ai contacté cette maison d’édition mais l’inverse. Ce nouveau roman n’a donc pas été proposé à un autre éditeur.

Votre troisième roman va bientôt paraître (novembre au Fleuve Noir). Pourriez-vous le présenter brièvement ?

Un thriller psychologique qui commence ainsi : un homme se réveille dans une cave, enfermé. Il ne se souvient plus comment il a atterri là, ne se souvient plus de ce qui s’est passé la veille… Une femme le retient prisonnier, sans qu’il sache pourquoi. Jeu barbare, vengeance, dessein meurtrier ou pure folie ?

A lui de trouver la réponse, et surtout l’issue de ce piège avant qu’il ne soit trop tard…

Avez-vous actuellement un autre roman en chantier ? Si oui, son thème, son titre si ce n'est pas indiscret.

Oui, en ce moment, je travaille sur un roman (dont je ne dévoilerai pas le titre !) qui m’a été demandé par mes anciens directeurs de collection Rail Noir, qui projettent de se lancer dans une nouvelle aventure : la création d’une maison d’édition qui reprendrait le flambeau de Rail Noir, tout en élargissant sa thématique. Mais je n’aime pas trop parler de mes romans avant leur parution, alors… suspens !

Dernière question traditionnelle : Quelle question ai-je oublié de vous poser ? Et sa réponse !

Aucune qui me vienne à l’esprit !! Je trouve qu’il y a déjà assez de questions pour aujourd’hui !

Passons au questionnaire de Proust (mis au goût du jour) :

Quel est votre principal trait de caractère  ? Joker !

La qualité que vous préférez chez un homme ? La générosité

Et chez une femme ? idem

Ce que vous appréciez le plus chez vos amis ?Qu’ils soient là quelles que soient les circonstances… Leur franchise à mon égard, aussi. Leur humour…

Votre principal défaut ? Un seul ?!!! C’est délicat de choisir ! J’en ai une collection exceptionnelle…

Votre plus grande peur ? Perdre ceux que j’aime

Si vous étiez un animal, vous seriez… ? Un chamois

Où aimeriez-vous vivre ? Dans un monde sans Sarkozy, sans Bush, sans Poutine, etc… !

La couleur que vous aimez ? Le noir, cela va de soi !

Vos auteurs favoris en prose ? Steinbeck, Troyat, Zola, Sartre, Mauriac, Voltaire…

Vos poètes préférés ? Charles Baudelaire

Vos héros / héroïnes dans la vie réelle ? Dans le désordre le plus complet : Martin Luther King, Anna Politkovskaïa, les étudiants de la Place Tien An Men, les moines de Birmanie…

Vos compositeurs classiques préférés ? Bach, Rachmaninov, Scriabin, Beethoven, Chopin, Sibelius, Barber, Tchaïkovsky…

La chanson que vous sifflez sous votre douche ? Aucune !

Les prénoms que vous préférez ? Alexandre, Guillaume, Franck, Marie, Thierry, Vincent, Anne…

Votre plat préfér ? Celui qu’on me prépare avec amour, pour me faire plaisir.

Que détestez-vous par-dessus tout ? La maladie, les dilemmes, la lâcheté, le fanatisme…

Quel personnage historique détestez-vous le plus ? Décidément, vos questions sont hard ! Comment choisir entre Hitler, Staline, Pol Pot, Pinochet, Mussolini  et tous les autres ?

La réforme historique que vous admirez le plus ? Difficile de choisir là encore ! L’abolition de l’esclavage, celle de la peine de mort en France…

Si vous deviez changer un aspect de votre apparence physique, lequel choisiriez-vous ? La liste serait trop longue, je vous l’épargne !

Votre plus grand regret ? Je le garderai pour moi…

Les fautes qui vous inspirent le plus d'indulgence ? Celles commises par amour, par passion.

Comment aimeriez-vous mourir ? En sauvant la vie de quelqu’un d’autre.

Etat présent de votre esprit ? Vos questions me stressent !

Votre devise ? En changer au fil des jours.

Lundi 29 octobre 2007

BIBLIOGRAPHIE :

EliciusJPG06 giebel_couvredemption02 KGiebel_couv_morsures02

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